Dans son livre Neurotribus, Steve Silberman plaide en faveur de la neurodiversité.
Il y explique que les génies, les surdoués et les personnes à haut potentiel sont étroitement liés à la notion d’autisme. Silberman constate que ceux qui ont conçu des langages de code révolutionnaires dans les années 80, les créateurs de la communication informatique — ce média qui façonne aujourd’hui notre réalité — ont plus d’enfants « autistes » que la moyenne. Ce lien entre neurodiversité et autisme, notamment le syndrome d’Asperger, ouvre une nouvelle réflexion. Ces personnes, souvent qualifiées de « handicapées du lien social », nous invitent à comprendre leur « logique positive » dans leur rapport au monde.
Deux modes de relation au monde :
- Le mode conventionnel :
- Un regard focalisé, cherchant des objectifs clairs et des réponses structurées qui orientent : cartes, vérités, dogmes, et codes sociaux. L’objectif est de se concentrer, de maintenir un ordre et de s’adapter aux attentes d’un groupe, dans une quête d’appartenance et d’inclusion (au sens étymologique, «enfermé».
- Le mode neurodivers :
- À l’inverse, les personnes neurodiverses — qu’on désigne par des acronymes comme TDA, TDAH, TSA, HPI, ou encore « geeks » — se tournent vers elles-mêmes. Leurs intérêts restreints deviennent des explorations infinies, débordant de créativité et franchissant les limites actuelles. Leur pensée s’étend au-delà de la réalité connue, mais leur rapport aux autres demeure complexe, car les codes sociaux ne leur apparaissent pas comme une priorité.
Ce décalage entre ces deux mondes peut provoquer une fracture. D’un côté, l’adaptation aux attentes de la société ; de l’autre, la vie perçue comme une exploration sans fin.
Ces personnes sont souvent perçues comme « troublées », « anormales » ou incapables de s’intégrer. Et pourtant, dans leur univers, elles redéfinissent les codes, créent un espace où l’infini semble encore trop restreint.
Neurodiversité et les frontières floues de la nature
Lorna Wing disait :
« Sans nom, rien n’existe ».
Un nouvel individu émerge : une personne qui se choisit d’abord elle-même avant de se tourner vers les autres. Dans cet univers, l’autre est perçu comme un miroir qui renvoie toujours quelque chose de soi-même, un aspect que l’on doit d’abord apprendre à aimer.
C’est ici que la notion de premier amour, celui que l’on s’offre à soi-même, devient essentielle. Se reconnaître et s’aimer pleinement permet de mieux accepter les différences de l’autre, de voir dans ce miroir une opportunité de croissance plutôt qu’une source de conflit.
Sapiosexualité et relation amoureuse
Le concept de sapiosexualité prend tout son sens ici : ce n’est pas le cerveau de l’autre qu’ils aiment, mais ce que ce cerveau leur fait ressentir. L’excitation de la découverte et de l’exploration intellectuelle remplace les attentes émotionnelles traditionnelles. Cela nous amène au thème central : l’amour.
A.E. Van Vogt disait :
« Nos vies durant, nous avons été seuls dans un monde d’hommes qui nous étaient étrangers.
C’est une joie particulière que celle de trouver enfin nos semblables. »
Cet amour, qui naît d’une acceptation de soi, permet une relation plus saine et équilibrée avec l’autre.
Deux formes d’amour :
- L’amour-sécurité du passé :
Un amour fondé sur la séparation et la dépendance : « Je ne suis rien sans toi ». Cet amour est né du manque de soi, une quête de sécurité par l’autre. - Un amour émergent :
Un amour pur, sans condition, qui naît de l’intégration de soi. L’autre n’est ni une nécessité, ni un centre, mais plutôt une source d’inspiration. Cet amour, loin de la dépendance, est une force créatrice. Il nous invite à être pleinement nous-mêmes, à aimer sans crainte ni attente. En aimant ce que nous sommes, nous pouvons accueillir l’autre dans toute sa diversité, car l’amour véritable ne craint ni la différence, ni le changement.
Conclusion : Vers un monde neurodiversifié
Les personnes neurodiverses remettent en question les modèles relationnels traditionnels. Elles nous poussent à accepter que, pour aimer pleinement l’autre dans ses différences, il est indispensable de commencer par s’aimer soi-même. Cet amour, celui que l’on s’offre à soi-même, est la clé pour naviguer dans un monde où les relations évoluent, où la diversité cognitive est une richesse à explorer.
Zosia Zaks l’a bien exprimé :
«Nous avons besoin de toutes les personnes à bord pour redresser le vaisseau de l’humanité.»
À nous de créer de nouvelles lignes de code, non seulement dans la technologie, mais aussi dans nos relations, en apprenant à nous aimer pour mieux aimer l’autre.
Prenez soin de vos différences,
Au plaisir, à vous,
Anne Yvonne
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